28/06/2008

Samedi 28 juin

Ce matin, tout le monde était dans la cour, les enfants, bien sûr, avec leur haut blanc comme le précisait le mot que j'avais distribué en début de semaine, les parents, tous les papas, toutes les mamans, presque, mais aussi des bébés venus en poussette, des papis accompagnés de mémés permanentées, hier, prévoyant, j'avais vérifié que les bancs et les chaises seraient encore à l'ombre à dix heures et demi, quand je prendrais le micro pour faire mon petit discours avant d'animer la chorale. J'ai allumé la sono, j'ai jeté un regard autour de moi, devant, tous les élèves, alignés par rangées bien réglées, ce matin, très tôt, j'avais tracé les repères, bleu pour les CM1, rouge pour les CE2, blanc pour les CE1, les CM2 au fond debout sur des bancs, et les CP, devant, j'ai pensé, bien, ils ont fière allure, mais, fallait aussi montrer l'exemple, j'ai pas bafouillé, la veille, j'avais griffoné quelques mots, un peu de faire sérieux, deux pointes de faire sourire, et pour finir, du faire silence, alors, j'ai pris mon courage dans les mains et ni une ni deux, juste trois et quatre, j'ai agité les bras et...
Bref, vous n'aviez qu'à être là.

Après qu'ils aient chanté, dans l'ordre affiché sur le pilier, les quatorze chansons que nous avions préparées cette année, avec mes chères collègues, en terminant par un tonitruant "y'a d'la joie", je m'apprétais à conclure et inviter tout le monde à partager la collation, quand j'ai vu mes élèves me faire des signes, venir en délégation au micro pour informer l'assemblée qu'il y avait une surprise, une chanson qu'ils avaient écrite, en secret...



Ils l'ont entonnée sur l'air de Céline, en me regardant dans les yeux, leurs parents m'observaient, frissonants, embués , pour eux aussi, c'était fini une deuxième fois l'école, moi, j'avais un peu chaud dans mon polo gris souris.

26/06/2008

Se prendre les pieds dans le plat...




Hier, à 17h20, j'avais rendez-vous chez le dentiste, et comme j'ai pensé que j'allais être en retard, je l'ai appelé pour m'excuser, il m'a dit ça fait rien, je vous attends, et, là, au lieu de dire bon, merci à tout à l'heure, je ne sais pas ce qui m'a pris, mais j'ai dit, bon, merci, bisou.

Remarque n°1: A force d'entretenir, ici, d'étranges relations affectives avec vous, j'ai apparemment fini par perdre le sens minimal des conventions sociales.

Remarque n°2 : C'était bien la peine, je suis arrivé pile à l'heure.

22/06/2008

Devoir



Trouvé dans le même cahier, dit de brouillon. La conscience muette devant la page à remplir, et, avant de se lancer, le léger mouvement d'hésitation, prendre le temps, repasser soigneusement la dernière lettre du premier mot ...

Suite impromptue...

"Tout ça pour rien", à entendre comme "Tout ça pour ça, et rien d'autre"




(Avant)
On commence toujours par expliquer nouveau phénomène avec de vieilles idées, celles que le temps a accumulées dans notre boîte à outils. Pour se débrouiller avec l’inattendu, l’inexplicable, on préfère bricoler un vague mécanisme, une extension bancale plutôt que d’accepter de lâcher prise et se retrouver en terre inconnue, sans repère ni mode d’emploi. Ce n’est que quand le phénomène insiste et résiste qu’on se risque à sortir de ce chez soi....

(Au début)
Quand on arrive la première fois ici, on agit avec des réflexes conditionnés ailleurs, on se déplace sur des rythmes déjà connus, journal intime, correspondance, billet d’humeur, communication, bavardage, témoignage, récit, essai, poèmes...

On n’imagine pas un seul instant qu’on entre dans un autre monde, situé entre le rêve et la réalité.

(à suivre, peut-être...)

21/06/2008

Tout ça pour rien ?



J'étais venu, malgré la chaleur, vous parler des fous, leur rendre hommage, mais il y avait un message de V.. J'aime beaucoup V.. Il fait partie, ici, de ces rencontres rares et improbables qui tournent à l'amitié, des sans chair qui deviennent chers. Son blog, brillant, érudit, m'a bien cassé la tête, des heures de relectures assidues accroché à l'étagère pour saisir et retenir des bribes. Voilà ce qu'il a déposé aujourd'hui sous mon précédent billet :

(On croirait vraiment qu'on n'a d'autre choix que d'en rester là, rester l'un pour l'autre cette ombre ensoleillée de nos seules illusions ! " Hors du temps et de l'espace " ! Hola, ho ! ;-)

Mais non, désacraliser l'autre (le "désimaginer") et prendre soi le risque (certain) de décevoir, c'est encore la meilleure chose à faire pour ne pas assombrir plus encore la "face sombre", penser que ce monde (du net) est vide ... Oui, il y a plein de freins à la rencontre, et au bout quelque désenchantement, mais elle est inéluctable. Sinon "tout ça pour rien" ?

Il n'y a peut-être donc pas d'illusion tant qu'on est en chemin. Mais a posteriori, certainement, quand on a manqué - de courage ? Voir l'âme, fut-elle très belle, à mon avis ne suffit pas, quand bien même nous sommes tombés, comme ici, sous son charme ;-)


Après avoir goûté le délicieux compliment, voilà ce qui m'a traversé :

“Tout ça pour rien” ? Peut-être la raison profonde d’en rester là, dans un non lieu et un non espace où les illusions ne trompent pas leur monde. Revenir sur Terre ? A quoi bon ? Pour quoi faire ? Recommencer ? Non ! "Tout ça pour rien", la légèreté, le détachement. Ici, nous ne vieillirons pas, nous resterons égaux, assis dans nos bulles lumineuses, écume.
La preuve ? Je ne cherchais rien et, miracle, je l’ai trouvé...

15/06/2008

Nowhere



Dans nos silences, le temps se déchire et me laisse songeur, immobile. Je parcours vos univers, me promène dans vos confidences, vous invente une vie. Je m'étonne de cet attachement insensé, absurde... Quel chemin ai-je bien pu emprunter pour arriver là ?

09/06/2008

...


Un jour, j'ai lu ceci : "Les marionnettes possèdent une agilité, une symétrie, une harmonie et une grâce bien supérieure à celles des humains car elles sont dépourvues de ces hésitations de la conscience qui sans arrêt les désarçonne". Cette manière de décrire la faiblesse humaine m'enchante, la soustraction qui dévoile le fond.
La chorégraphie du "Premier silence" retourne merveilleusement ce paradigme. Lorsque le rideau se lève, le corps du danseur oscille suspendu au-dessus de la scène et s'écroule soudain alors que la marionnette, assise sur une estrade derrière lui, sectionne d'un geste le fil qui le retenait....

Je ne sais pas ce qui me pousse à vous raconter des trucs pareils et si, d'aventure, quelqu'un en connaissait la raison, je le remercie, par avance, de la garder pour lui...

02/06/2008

Lettre manquante...



L’alphabet dit le monde, chaque lettre, bulle d’air entourée de mystère, désigne un point de fuite. Quand un signe disparait, le langage se met à boiter, la raison se retire...

01/06/2008

Hallucinatoire


Des fois, je fais écran, je réfléchis et la petite lumière bleue m'éclaire.


Le monde a basculé. Il est passé de la verticale à l'horizontale. L'image et l'instant en ont profité pour prendre le pouvoir.

La scène sur laquelle nous évoluons a changé (les écrans), le rapport au temps dans lequel nous nous inscrivons s'est transformé (ère du clic), mais notre condition ne change pas, on continue à s'attacher (aux autres) et à ne pouvoir s'échapper (de soi), les deux aliénations de base. Le texte est toujours le même, Sophocle et Shakespeare restent d'actualité.

(Le changement est à la marge mais on aime à penser qu'avant c'était différent (mieux) rassurez-vous, c'était pire. On vient du pire pour aller au pire, on est juste au milieu, l'homme et l'histoire du milieu coincident exactement, ne me demandez pas pourquoi.)

L'humanité a perdu son continent, reste une multitude d'ils, perdus dans la nature, libres et égaux, et ça fait flipper, vaut mieux rester chez soi, masqué derrière son écran.


(C'est Fishturn qui m'a obligé à dire ça, c'est lui qui tire les ficelles)